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Les signes de ce temps, les voici : des clairons,
Des femmes dans les camps, des plumes sur les fronts,
Des carnavals durant la moitié de l'année,
Une jeunesse folle au plaisir acharnée,
Joyeuse ; et la rougeur sinistre des vieillards.

Quand deux pères rôdant le soir dans les brouillards
Se rencontrent non loin de vos éclats de rire,
Ils passent sans lever les yeux et sans rien dire.

Spectacle ténébreux qu'un peuple décroissant !
Même quand tous sont là, l'on sent quelqu'un d'absent ;
C'est l'âme, c'est l'esprit sacré, c'est la patrie.
Une foule avilie, une race flétrie
Perd sa lumière ainsi qu'un bois mort perd sa fleur.
Que ce soit l'Italie ajoute à ma douleur.
La chose est surprenante et triste que des traîtres,
Des coquins, généraux de moines et de reîtres,
Puissent rapetisser lentement dans leur main
Un peuple, quand ce peuple est le peuple romain.
En lisant aux enfants l'histoire d'Agricole
Ou de Cincinnatus, les vieux maîtres d'école
S'arrêtent et n'ont pas la force d'achever.