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Une augmentation de honte et de bassesse,
D'ombre et de déshonneur n'accroît pas les maisons ;
La fange n'a jamais redoré les blasons.
Ah ! deuil sans borne après les prouesses sans nombre !
Vous faites du passé votre piédestal sombre ;
Sur les grands siècles morts sans tache et sans défaut
Vous montez, pour porter votre honte plus haut !
Vous semblez avec eux avoir fait la gageure
D'égaler leur lumière et leur lustre en injure,
Et de ne pas laisser à leur vieille fierté
Une splendeur sans mettre un opprobre à côté ;
Et vous avez le prix dans cette affreuse joute
Où votre abjection à leur gloire s'ajoute !

Ô Dieu qui m'entendez, ces hommes sont hideux,
Certe, ils sont étonnés de nous comme nous d'eux.
Avez-vous fait erreur ? et que faut-il qu'on pense ?
À qui le châtiment ? à qui la récompense ?
Quelle nuit ! N'est-ce pas le plus dur des affronts
Que nous les preux ayions pour fils eux, les poltrons !
Et qu'abjects et rompant les anciens équilibres,
Eux les tyrans, soient nés de nous, les hommes libres ;
Si bien que l'honnête homme est chargé du maudit
Et que le juste doit répondre du bandit !
Qu'ont-ils fait pour porter des noms comme les nôtres ?
Par quel fil pouvons-nous tenir les uns aux autres,
Dieu puissant ! et comment avons-nous mérité