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Atlas porte le monde, et l’on entend le pôle
Craquer quand le géant lassé change d’épaule ;
Lié sous le volcan Liparis, noir récif,
Typhée est au milieu de la flamme, pensif.
Tous ces titans, Stellos, Talémon, Ecmonide,
Gès dont l’œil bleu faisait reculer l’euménide,
Ont succombé, percés des flèches de l’éther,
Sous le guet-apens brusque et vil de Jupiter.
Les géants qui gardaient l’âge d’or, dont la taille
Rassurait la nature, ont perdu la bataille,
Et les colosses sont remplacés par les dieux.
La terre n’a plus d’âme et le ciel n’a plus d’yeux ;
Tout est mort. Seuls ces rois épouvantables vivent.
Les stupides saisons comme des chiens les suivent,
L’ordre éternel les semble approuver en marchant ;
Dans l’Olympe, où le cri du monde arrive chant,
Où l’étourdissement conseille l’inclémence,
On rit. Tant de victoire a droit à la démence.
Et ces dieux ont raison. Phtos écume. — Oui, dit-il,
Ils ont raison. Eau, flamme, éléments, air subtil,
Vous ne vous êtes pas défendus. Votre orage
N’a pas eu dans la lutte affreuse assez de rage ;
Vous vous êtes laissés museler lâchement.
Le mal triomphe ! — Et Phtos frémit. Écroulement !
Tous les géants sont pris et garrottés. Que faire ?
Il songe.