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III

CE QUE LES GÉANTS SONT DEVENUS


 
Il songe au fier passé des puissants terrigènes,
Maintenant dispersés dans vingt charniers divers,
Vastes membres d’un monstre auguste, l’univers ;
Toute la terre était dans ces hommes énormes ;
À cette heure, mêlés aux montagnes sans formes,
Ils gisent, accablés par le destin hideux,
Plus morts que le sarment qu’un pâtre casse en deux.
Où sont-ils ? sous des rocs abjects, cariatides
Des Ténares ardents, des Cocytes fétides ;
Encelade a sur lui l’infâme Etna fumant ;
C’est son bagne ; et l’on voit de l’âpre entassement
Sortir son pied qui semble un morceau de montagne ;
Thor est sous l’écueil noir qui sera la Bretagne ;
Sur Anax, le géant de Tyrinthe, Arachné
File sa toile, tant il est bien enchaîné ;