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Thèbe adore en tremblant la foudre triomphale ;
Et trois fleuves, le Styx, l’Alphée et le Stymphale,
Se sont enfuis sous terre et n’ont plus reparu.
Aquilon passe avec un grondement bourru ;
On ne sait ce qu’Eurus complote avec Borée ;
Faune se cache ainsi qu’une bête effarée ;
Plus de titans ; Mercure éclipse Hypérion ;
Zéphire chante et danse ainsi qu’un histrion ;
Quant aux Cyclopes, fils puînés, ils sont lâches ;
Ils servent ; ils ont fait leur paix ; les viles tâches
Conviennent aux cœurs bas ; Vulcain, le dieu cagneux,
Les emploie à sa forge, a confiance en eux,
Les gouverne, et, difforme et boiteux, distribue
L’ouvrage à ces géants par qui la honte est bue ;
Brontès fait des trépieds qui parlent, Pyracmon
Fait des spectres d’airain où remue un démon ;
On ne résiste plus aux dieux, même en Sicile ;
Polyphème amoureux n’est plus qu’un imbécile,
Et Galatée en rit avec Acis.

Et Galatée en rit avec Acis.Les champs
N’ont presque plus de fleurs, tant les dieux sont méchants ;
Les dieux semblent avoir cueilli toutes les roses.
Ils font la guerre à Pan, à l’être, au gouffre, aux choses ;
Ils ont mis de la nuit jusque dans l’œil du lynx ;
Ils ont pris l’ombre, ils ont fait avouer les sphinx,