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― Et qu’est-ce que tu peux ?Je peux, en me levant,
Tout déplacer, chasser les flots, courber les chênes,
Arracher tous les gonds, rompre toutes les chaînes,
Et si je le voulais, d’un souffle, moi Vâyou,
Plus aisément qu’au fleuve on ne jette un caillou
Ou que d’une araignée on ne crève les toiles,
J’emporterai la terre à travers les étoiles.

L’apparition prit un brin de paille et dit :
― Emporte ceci.

― Emporte ceci.Puis, avant qu’il répondît,
Elle posa devant le dieu le brin de paille.

Alors, avec des yeux d’orage et de bataille,
Le dieu Vâyou se mit à grandir jusqu’au ciel,
Il troua l’effrayant plafond torrentiel,
Il ne fut plus qu’un monstre ayant partout des bouches,
Pâle, il démusela les ouragans farouches
Et mit en liberté l’âpre meute des airs ;
On entendit mugir le simoun des déserts
Et l’aquilon qui peut, par-dessus les épaules