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C’est du choc convulsif des groupes des typhons,
C’est du rassemblement des nuages profonds,
Que le vieux Phidias d’Athènes, statuaire,
Composa, dans l’horreur sainte du sanctuaire,
L’immense apaisement de ma sérénité.
Quand, dans le saint pœan par les mondes chanté,
L’harmonie amoindrie avorte ou dégénère,
Je rends le rhythme aux cieux par un coup de tonnerre ;
Mon crâne plein d’échos, plein de lueurs, plein d’yeux,
Est l’antre éblouissant du grand Pan radieux ;
En me voyant on croit entendre le murmure
De la ville habitée et de la moisson mûre,
Le bruit du gouffre au chant de l’azur réuni,
L’onde sur l’océan, le vent dans l’infini,
Et le frémissement des deux ailes du cygne ;
On sent qu’il suffirait à Jupiter d’un signe
Pour mêler sur le front des hommes le chaos ;
Que seul je mets la bride aux bouches des fléaux,
Que l’abîme est mon hydre, et que je pourrais faire
Heurter le pôle au pôle et l’étoile à la sphère,
Et rouler à flots noirs les nuits sur les clartés,
Et s’entre-regarder les dieux épouvantés,
Plus aisément qu’un pâtre au flanc hâlé ne jette
Une pierre aux chevreaux broutant sur le Taygète.