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Un mède, Ajax de Suze, un grec, Phtos de Mégare,
Ont ciselé les monts où la meute s’égare,
Et la pudeur sauvage, et les dieux de la paix,
Des Triptolèmes nus parmi les blés épais,
Et des Cérès foulant sous leurs pieds des Bellones ;
Cent-vingt-sept rois ont fait mes cent vingt-sept colonnes ;
Je suis l’art radieux, saint, jamais abattu ;
Ma symétrie auguste est sœur de la vertu ;
Mon resplendissement couvre toute la Grèce ;
Le rocher qui me porte est rempli d’allégresse,
Et la ville à mes pieds adore avec ferveur ;
Sparte a reçu sa loi de Lycurgue rêveur,
Mantinée a reçu sa loi de Nicodore,
Athènes, qu’un reflet de divinité dore,
De Solon, grand pasteur des hommes convaincus,
La Crète de Minos, Locres de Séleucus,
Moi, le temple, je suis législateur d’Éphèse ;
Le peuple en me voyant comprend l’ordre et s’apaise ;
Mes degrés sont les mots d’un code, mon fronton
Pense comme Thalès, parle comme Platon,
Mon portique serein, pour l’âme qui sait lire,
À la vibration pensive d’une lyre,
Mon péristyle semble un précepte des cieux ;
Toute loi vraie étant un rhythme harmonieux,
Nul homme ne me voit sans qu’un dieu l’avertisse ;
Mon austère équilibre enseigne la justice ;
Je suis la vérité bâtie en marbre blanc ;
Le beau, c’est, ô mortels, le vrai plus ressemblant ;