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Qu’il fixe ses yeux pleins d’un divin flamboiement
Sur le sol où les rocs dorment profondément,
Tout s’éveille ; un frisson fait remuer la pierre ;
Lourd, ouvrant on ne sait quelle trouble paupière,
Le granit cherche à voir son maître, le rocher
Sent la statue en lui frémir et s’ébaucher,
Le marbre obscur s’émeut dans la nuit infinie
Sous la parenté sombre et sainte du génie,
Et l’albâtre enfoui ne veut plus être noir ;
Le sol tressaille, il sent là-haut l’homme vouloir ;
Et voilà que, sous l’œil de ce passant qui crée,
Des sourdes profondeurs de la terre sacrée,
Tout à coup, étageant ses murs, ses escaliers,
Sa façade et ses rangs d’arches et de piliers,
Fier, blanchissant, cherchant le ciel avec sa cime,
Monte et sort lentement l’édifice sublime,
Composé de la terre et de l’homme, unissant
Ce que dans sa racine a le chêne puissant
Et ce que rêve Euclide aidé de Praxitèle,
Mêlant l’éternel bloc à l’idée immortelle !

Mon frontispice appuie au calme entablement
Ses deux plans lumineux inclinés mollement,
Si doux qu’ils semblent faits pour coucher des déesses ;
Parfois, comme un sein nu sous l’or des blondes tresses,
Je me cache parmi les nuages d’azur ;
Trois sculpteurs sur ma frise, un volsque, Albus d’Anxur,