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« Si j’étais Cos, j’irais forgeant les durs essieux ;
« Si j’étais Tentyris, sombre ville du rêve,
« Mes pâtres, fronts sacrés en qui le ciel se lève,
« Regarderaient, à l’heure où naît le jour riant,
« Les constellations, penchant sur l’Orient,
« Verser dans l’infini leurs chariots pleins d’astres ;
« Si j’étais Bactria, j’aurais des Zoroastres ;
« Si j’étais Olympie en Élide, mes jeux
« Montreraient une palme aux lutteurs courageux,
« Les devins combattraient chez moi les astronomes,
« Et mes courses, rendant les dieux jaloux des hommes,
« Essouffleraient le vent à suivre Corœbus ; —
« Mais à quoi bon chercher tant d’inutiles buts,
« Ayant, que l’aube éclate ou que le soir décline,
« Ce temple ionien debout sur ma colline,
« Et pouvant faire dire à la terre : c’est beau ! »
Et ma ville a raison. Ainsi qu’un escabeau
Devant un trône, ainsi devant moi disparaissent
Les Parthénons fameux que les rayons caressent ;
Ils sont l’effort, je suis le miracle.

Ils sont l’effort, je suis le miracle.À celui
Qui ne m’a jamais vu, le jour n’a jamais lui.
Ma tranquille blancheur fait venir les colombes ;
Le monde entier me fête, et couvre d’hécatombes,
Et de rois inclinés, et de mages pensifs,
Mes grands perrons de jaspe aux clous d’argent massifs.