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Ah ! tu ne tueras point, et tu m’écouteras,
Chevalier, puisque j’ai l’aurore dans mes bras.
Songe à ta mère. Eh bien, je suis mère comme elle.
Homme, respecte en moi la femme. — À bas, femelle !
Dit Tiphaine, et du pied il frappe ce sein nu.

Ce fut dans on ne sait quel ravin inconnu
Que Tiphaine atteignit le pauvre enfant farouche ;
L’enfant pris n’eut pas même un râle dans la bouche ;
Il tomba de cheval, et morne, épuisé, las,
Il dressa ses deux mains suppliantes, hélas !
Sa mère morte était dans le fond de la tombe,
Et regardait.

Et regardait.Tiphaine accourt, s’élance, tombe
Sur l’enfant, comme un loup dans les cirques romains,
Et d’un revers de hache il abat ces deux mains
Qui dans l’ombre élevaient vers les cieux la prière ;
Puis, par ses blonds cheveux dans une fondrière
Il le traîne.

Il le traîne.Et riant de fureur, haletant,
Il tua l’orphelin et dit : Je suis content !
Ainsi rit dans son antre infâme la tarasque.