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Gor où le Cid pleurait de voir le jour finir,
C’est offenser le roi que de s’en souvenir.
Même il est malséant de parler de Chimène.

Un homme étant allé visiter un domaine
Dans les pays qui sont entre l’Èbre et le Cil,
Du côté que le Cid habite en son exil,
A passé par hasard devant son écurie ;
Le duc Juan, dont cet homme est serf en Asturie,
Bon courtisan, l’a fait à son retour punir
Pour avoir entendu Babieça hennir.

Donc, chacun l’a pour dit, n’est pas sujet fidèle
Qui parle de Tortose et de la citadelle
Où le glorieux Cid arbora son drapeau ;
Dire ces mots : Baxa, Médina del Campo,
Vergara, Salinas, Mondragon-les-Tours-Noires,
Avec l’intention de nommer des victoires,
Ce n’est point d’un loyal Espagnol ; qu’autrefois
Un homme ait fait lâcher au comte Odet de Foix
Les infantes d’Irun, Payenne et Manteline ;
Que cet homme ait sauvé la Castille orpheline ;
Qu’il ait dans la bataille été le grand cimier ;
Que les Maures, foulés par lui comme un fumier,
L’admirent, et, vaincus, donnent son nom célèbre
Au ruisseau Cidacos qui se jette dans l’Èbre ;