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III

LA GARDE


 
Ninive, Sybaris, Chypre, et les cinq Sodomes
Ayant fourni beaucoup de ces soldats, la loi
Ne les admettait point dans la garde du roi.
L’armée est une foule ; elle chante, elle hue ;
Mais la garde, jamais mêlée à la cohue,
Muette, comme on est muet près des autels,
Marchait seule ; et d’abord venaient les Immortels,
Semblables aux lions secouant leurs crinières ;
Rien n’était comparable au frisson des bannières
Ouvrant et refermant leurs plis pleins de dragons ;
Tout le sérail du roi suivait dans des fourgons ;
Puis marchaient, plus pressés que l’herbe des collines,
Les eunuques, armés de longues javelines ;
Puis les bourreaux, masqués, traînant les appareils
De torture et d’angoisse, à des griffes pareils,
Et la cuve où l’on fait bouillir l’huile et le nitre.
Le Perse a la tiare et le Mède a la mitre ;
Les Dix mille, persans, mèdes, tous couronnés,
S’avançaient, fiers, ainsi que des frères aînés,
Et ces soldats mitrés étaient sous la conduite
D’Alphès, qui savait tous les chemins, hors la fuite ;