Page:Hugo - La Légende des siècles, 2e série, édition Hetzel, 1877, tome 1.djvu/112

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

La légion marchait à côté de la horde,
L’homme nu coudoyait l’homme cuirassé d’or.
Une captive en deuil, la sibylle d’Endor,
S’indignait, murmurant de lugubres syllabes ;
Les chevaux ayant peur des chameaux, les Arabes
Se tenaient à distance et venaient les derniers ;
Après eux cheminaient, encombrés des paniers
Où brillait le butin rapporté des ravages,
Cent chars d’osier traînés par des ânes sauvages.

L’attroupement formé de cette façon-là
Par tous ceux que la Perse en ses rangs appela,
Épais comme une neige au souffle de la bise,
Commandé par vingt chefs monstrueux, Mégabise,
Hermamythre, Masange, Acrise, Artaphernas,
Et poussé par les rois aux grands assassinats,
Cet énorme tumulte humain, semblable aux rêves,
Cet amas bigarré d’archers, de porte-glaives,
Et de cavaliers droits sur les lourds étriers,
Défilait, et ce tas de marcheurs meurtriers
Passait pendant sept jours et sept nuits dans les plaines,
Troupeau de combattants aux farouches haleines,
Vaste et terrible, noir comme le Phlégéton,
Et qu’on faisait marcher à grands coups de bâton.
Et ce nuage était de deux millions d’hommes.