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Le fourbe Gaïnas et le louche Bourbon
N’ont trahi que des rois dans leur noirceur profonde,
Mais vous, vous trahissez la liberté du monde ;
Votre fanfare sort du charnier, vos tambours
Sont pleins du cri des morts dénonçant les Habsbourgs ;
Et, lorsque vous croyez chanter dans la trompette,
Ce chant joyeux, la tombe en sanglot le répète.
Forçant Mantoue, à Pesth aidant le coutelas,
Buquoy, Mozellani, Londorone, Galas,
Sont vos chefs ; vous avez, reîtres, fait une espèce
De hauts faits et d’exploits dont la fange est épaisse ;
À Bergame, à Pavie, à Crême, à Guastalla,
Vous témoins, vous présents, vous mettant le holà,
À la sainte Italie on lisait sa sentence ;
On promenait de rue en rue une potence,
Et, vous, vous escortiez la charrette ; et ceci
Ne vous quittera plus, et sans fin ni merci
Ce souvenir vous suit, étant de la nuit noire ;
Ô malheureux ! vos noms traverseront l’histoire
À jamais balafrés par l’ombre qui tombait
Sur vos drapeaux des bras difformes du gibet.

Deuil sans fond ! c’est l’honneur de leur pays qu’ils tuent ;
En se prostituant, c’est moi qu’ils prostituent ;
Nos vieux pins ont fourni leurs piques dont l’acier