Page:Hugo - La Légende des siècles, 1e série, édition Hetzel, 1859, tome 1.djvu/285

Cette page a été validée par deux contributeurs.
259
SULTAN MOURAD.

Regarda d’un regard ineffable, un moment,
L’homme qui l’assistait dans son accablement ;
Puis son œil se perdit dans l’immense mystère ;
Il expira.


IV



Il expira. Le jour où ceci sur la terre
S’accomplissait, voici ce que voyait le ciel :

C’était dans l’endroit calme, apaisé, solennel,
Où luit l’astre idéal sous l’idéal nuage,
Au delà de la vie, et de l’heure, et de l’âge,
Hors de ce qu’on appelle espace, et des contours
Des songes qu’ici-bas nous nommons nuits et jours ;
Lieu d’évidence où l’âme enfin peut voir les causes,
Où, voyant le revers inattendu des choses,
On comprend, et l’on dit : « C’est bien ! » l’autre côté
De la chimère sombre étant la vérité ;
Lieu blanc, chaste, où le mal s’évanouit et sombre.
L’étoile en cet azur semble une goutte d’ombre.

Ce qui rayonne là, ce n’est pas un vain jour
Qui naît et meurt, riant et pleurant tour à tour,