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Effroyable prison qui n’a point de mémoire !
La geôle, au dehors noire est aveugle au dedans ;
Elle prend ! sans les voir, des hommes dans ses dents
Et, sans s’informer d’eux, les mâche et les dévore.

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En entrant dans ces murs terribles, où, pour eux,
Les heures maintenant, hélas, seront si lentes,
Les captifs sont inscrits sur des feuilles volantes ;
Pas de livre d’écrou. Tout est fait de façon
Que rien ne laisse trace en cette âpre prison,
Et que le nom s’y perde en même temps que l’homme.
Quel est ce prisonnier, et comment on le nomme,
Après dix ou vingt ans, personne ne le sait ;
Pas même lui. La dalle ignore ce que c’est,
Le carcan le saisit au cou sans le connaître,
Et le ver, qui déjà goûte à sa chair peut-être,
Ne peut dire son nom à la taupe qui fuit.
Hier, aujourd’hui, demain, ne font qu’un. Plus un bruit.
L’homme, qui maintenant va mourir goutte à goutte,
Une fois qu’il a mit le pied sous cette voûte,
Sent au-dessus de lui son propre effacement.