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Il était la montagne errante de la mer ;
Mais les heures, les jours, les mois, les ans, ces ondes,
Ont passé ; l’Océan, vaste, entre les deux mondes,
A rugi, de brouillard et d’orage obscurci ;
La mer a ses écueils cachés, le temps aussi ;
Et maintenant, parmi les profondeurs farouches,
Sous les vautours, qui sont de l’abîme les mouches,
Sous le nuage, au gré des souffles, dans l’oubli
De l’infini, dont l’ombre affreuse est le repli,
Sans que jamais le vent autour d’elle s’endorme,
Au milieu des flots noirs roule l’épave énorme !



L’ancien monde, l’ensemble étrange et surprenant
De faits sociaux, morts et pourris maintenant,
D’où sortit ce navire aujourd’hui sous l’écume,
L’ancien monde, aussi, lui, plongé dans l’amertume,
Avait tous les fléaux pour vents et pour typhons.
Construction d’airain aux étages profonds,
Sur qui le mal, flot vil, crachait sa bave infâme,
Plein de fumée, et mû par une hydre de flamme,
La Haine, il ressemblait à ce sombre vaisseau.

Le mal l’avait marqué de son funèbre sceau.