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Ils pensent que faiblir est chose abominable,
Que l’homme est au devoir, et qu’il est convenable
Que ceux à qui Dieu fit l’honneur de les choisir
Pour vivre dans un temps de risque et de désir,
Marchent, et, courant droit au but qui les réclame,
Désapprennent les pas en arrière à leur âme.
Ils veulent le progrès durement acheté,
Ne tiennent en réserve aucune lâcheté,
Jettent aux profondeurs leurs jours, leur cœur, leur joie,
Ne se rétractent point parce qu’un gouffre aboie,
Vont toujours en avant et toujours devant eux ;
Ils ne sont pas prudents de peur d’être honteux ;
Et disent que le pont où l’on se précipite,
Hardi pour l’abordage, est lâche pour la fuite.
Soi-même se scruter d’un regard inclément,
Être abnégation, martyre, dévouement,
Bouclier pour le faible et pour le destin cible,
Aller, ne se garder aucun retour possible,
Ne jamais se servir pour s’évader d’en haut,
Pour fuir, de ce qui sert pour monter à l’assaut,
Telle est la loi ; la loi du devoir, du Calvaire,
Qui sourit aux vaillants avec son front sévère.
Peuple, homme, esprit humain, avance à pas altiers !
Parmi tous les écueils et dans tous les sentiers,
Dans la société, dans l’art, dans la morale,