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» Fouille le globe avec une hydre sous ses pieds ;
» La racine effrayante aux longs cous repliés,
» Aux mille becs béants dans la profondeur noire,
» Descend, plonge, atteint l’ombre et tâche de la boire,
» Et, bue, au gré de l’air, du lieu, de la saison,
» L’offre au ciel en encens ou la crache en poison,
» Selon que la racine, embaumée ou malsaine,
» Sort, parfum, de l’amour, ou, venin, de la haine.
» De là, pour les héros, les grâces et les dieux,
» L’œillet, le laurier- rose et le lys radieux,
» Et pour l’homme qui pense et qui voit, la ciguë.

» Mais qu’importe à la terre ! Au chaos contiguë,
» Elle fait son travail d’accouchement sans fin.
» Elle a pour nourrisson l’universelle faim.
» C’est vers son sein qu’en bas les racines s’allongent.
» Les arbres sont autant de mâchoires qui rongent
» Les éléments, épars dans l’air souple et vivant ;