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le vainqueur de la vie. Tout à coup de nouvelles forces étaient arrivées contre lui du fond de l’inconnu, non plus avec des menaces, mais avec des caresses et des sourires ; à lui, tout pénétré d’amour angélique, l’amour draconien et matériel était apparu ; la chair l’avait saisi, lui qui vivait d’idéal ; il avait entendu des paroles de volupté semblables à des cris de rage ; il avait senti des étreintes de bras de femme faisant l’effet de nœuds de couleuvre ; à l’illumination du vrai avait succédé la fascination du faux ; car ce n’est pas la chair, qui est le réel, c’est l’âme. La chair est cendre, l’âme est flamme. À ce groupe lié à lui par la parenté de la pauvreté et du travail, et qui était sa véritable famille naturelle, s’était substituée la famille sociale, famille du sang, mais du sang mêlé, et, avant même d’y être entré, il se trouvait face à face avec un fratricide ébauché. Hélas ! il s’était laissé reclasser dans cette société dont Brantôme, qu’il n’avait pas lu, a dit : Le fils peut justement appeler le père en duel. La