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réglée a supprimé la crique où était amarrée l’ourque biscayenne. Pour retrouver quelque vestige de ce petit mouillage démoli, il faudrait chercher sur la côte orientale de la presqu’île, vers la pointe, au delà de Folly-Pier et de Dirdle-Pier, au delà même de Wakeham, entre le lieu dit Church-Hop et le lieu dit Southwell.

La crique, murée de tous les côtés par des escarpements plus hauts qu’elle n’était large, était de minute en minute plus envahie par le soir ; la brume trouble, propre au crépuscule, s’y épaississait ; c’était comme une crue d’obscurité au fond d’un puits ; la sortie de la crique sur la mer, couloir étroit, dessinait dans cet intérieur presque nocturne, où le flot remuait, une fissure blanchâtre. Il fallait être tout près pour apercevoir l’ourque amarrée aux rochers et comme cachée dans leur grand manteau d’ombre. Une planche jetée du bord à une saillie basse et plate de la falaise, unique point où l’on pût prendre pied, mettait la barque en communication avec la terre ; des formes noires marchaient et se croisaient sur ce pont branlant, et dans ces ténèbres des gens s’embarquaient.