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Le chef dit :

— Allégeons l’épave !

Pendant la tempête on avait amarré les quelques coffres qui étaient sur le pont. Ils étaient restés liés au tronçon du mât. On défit les amarres, et on roula les coffres à l’eau par une des brèches du bordage. Une de ces valises appartenait à la femme basquaise qui ne put retenir ce soupir :

— Oh ! ma cape neuve doublée d’écarlate ! oh ! mes pauvres bas en dentelle d’écorce de bouleau ! Oh ! mes pendeloques d’argent pour aller à la messe du mois de Marie !

Le pont déblayé, restait la cabine. Elle était fort encombrée. Elle contenait, on s’en souvient, des bagages qui étaient aux passagers et des ballots qui étaient aux matelots.

On prit les bagages, et on se débarrassa de tout ce chargement par la brèche du bordage.

On retira les ballots, et on les poussa à l’Océan.

On acheva de vider la cabine. La lanterne, le chouquet, les barils, les sacs, les bailles et les charniers, la marmite avec la soupe, tout alla aux flots.