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La gazette des fonds secrets de l’empereur
Dit des choses sur toi qu’on lit avec horreur,
Que tu comptes les mots d’un télégramme, et même
Qu’on boit de mauvais vin chez toi, qu’on fait carême
A ta table, et que B. n’ira plus dîner là ;
Et caetera. Tu t’es attiré tout cela.
Monsieur Veuillot t’appelle avec esprit citrouille ;
A compter tes forfaits la mémoire s’embrouille :
Ivrognerie et vol, képi sans numéro,
Avarice. Tu vis sous clameur de haro.
C’est ta faute. Pourquoi n’es-tu pas raisonnable ?
Renonce à tenir tête au mal. Sois convenable.
Tenir tête au mal, certe, est bon ; mais être seul
Est mauvais. Tu n’es pas barbon, vieillard, aïeul,
Pour avancer alors que ton siècle recule ;
Combattre en cheveux blancs et seul, est ridicule ;
Un vaillant qui devient prudent grandit encor ;
Nestor jeune est Ajax, Ajax vieux est Nestor ;
Sois de ton âge ; enseigne aux peuples la sagesse.
La Vérité trop nue est une sauvagesse ;
Rudoyer le succès est l’acte d’un butor ;
Tout vainqueur a raison, tout ce qui brille est or ;
Aquilon est le dieu, Girouette est le culte.
Bonaparte est tombé, c’est pourquoi je l’insulte.
Est-ce ma faute, à moi, si le sort se dément ?
Je ne sors pas de là ; réussissez. Comment !
Aujourd’hui, l’on est tous, d’une façon oblique,
D’accord ; c’est à cela que sert la République ;