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BUG-JARGAL.
Un dogue vint joyeusement su rouler à mes pieds. (Page 60.)
Un dogue vint joyeusement su rouler à mes pieds. (Page 60.)

sur le front granitique des montagnes de l’orient.

XXXVIII

Biassou paraissait rêveur. Quand la revue fut terminée, qu’il eut donné ses derniers ordres, et que tous les rebelles furent rentrés sous leurs ajoupas, il m’adressa la parole.

« Jeune homme, me dit-il, tu as pu juger à ton aise de mon génie et de ma puissance. Voici que l’heure est venue pour toi d’en aller rendre compte à Léogri.

— Il n’a pas tenu à moi qu’elle ne vînt plus tôt, lui répondis-je froidement.

— Tu as raison, » répliqua Biassou. Il s’arrêta un moment comme pour épier l’effet que produirait sur moi ce qu’il allait me dire, et il ajouta : « Mais il ne tient qu’à toi qu’elle ne vienne pas.

— Comment ! m’écriai-je étonné, que veux-tu dire ?

— Oui, continua Biassou, ta vie dépend de toi ; tu peux la sauver si tu le veux. »

Cet accès de clémence, le premier et le dernier sans doute que Biassou ait jamais eu, me parut un prodige. L’obi, surpris comme moi, s’était élancé du siège où il avait conservé si longtemps la même attitude extatique, à la mode des fakirs hindous. Il se plaça en face du généralissime et éleva la voix avec colère :

« Que dice el exelentissimo señor mariscal de