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NOTES.
CHAMBRE DES DÉPUTÉS
Séance du 23 mai.

À l’ouverture de la séance, M. Charles Floquet, président de la Chambre, se lève et dit :

Mes chers collègues, le monde vient de perdre un grand homme ; la France pleure un de ses meilleurs citoyens, un fils qui a enrichi l’antique trésor de notre gloire nationale. (Très bien ! très bien !) Le dix-neuvième siècle n’entendra plus la voix de son contemporain, de celui qui a été l’écho sonore de ses joies et de ses douleurs, le témoin passionné de ses grandeurs et de ses désastres.

Le poëte, celui qu’on appelait l’enfant sublime, avait charmé jusqu’au ravissement la jeunesse brillante de ce siècle. Aux heures sombres, le penseur avait soutenu les consciences, relevé les courages. (Applaudissements.) Et, dans les dernières années, le vieillard auguste nous était revenu, apportant au milieu de nos malheurs et de nos luttes l’esprit de concorde et la tolérance de celui qui peut tout comprendre et tout concilier, ayant tout souffert pour la République. (Vifs applaudissements.)

Nous nous étions habitués à le croire immortel dans sa laborieuse et indomptable vieillesse ; désormais il vivra dans l’éternelle admiration de la postérité, dans le cercle lumineux des esprits souverains qui imposent leur nom à leur âge. (Applaudissements.)

Victor Hugo n’a pas seulement ciselé et fait resplendir notre langue comme une merveille de l’art ; il l’a forgée comme une arme de combat, comme un outil de propagande. (Nouveaux et vifs applaudissements.)

Cette arme, il l’a vaillamment tournée, pendant plus de soixante années, contre toutes les tyrannies de la force. (Applaudissements.) Pendant plus de soixante années, la propagande de ce héros de l’humanité a été en faveur des faibles, des humbles, des déshérités, pour la défense du pauvre, de la femme, de l’enfant, pour le respect inviolable de la vie, pour la miséricorde envers ceux qui s’égarent et qu’il appelait à la lumière et au devoir. (Applaudissements répétés.)

C’est pourquoi le nom de Victor Hugo doit être proclamé, non seulement dans l’enceinte des académies où s’inscrit la renommée des artistes, des poëtes, des philosophes, mais dans toutes les