Page:Hugo - Actes et paroles - volume 7.djvu/51

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
41
LE SEIZE MAI. — LA DISSOLUTION.

une diligence. Nos ennemis peuvent se liguer. Soit. Leur ligue est vaine. Au milieu de nos fluctuations et de nos orages, dans l’obscurité de la lutte profonde, quelqu’un qu’on ne terrasse pas est dès à présent visible et debout, c’est la loi, l’éternelle loi honnête et juste qui sort de la conscience publique, et derrière la brume épaisse où nous combattons il y a un victorieux, l’avenir. (Vive sensation. — Applaudissements à gauche.)

Nos enfants auront cet éblouissement. Et, nous aussi, et avec plus d’assurance que les anciens croisés, nous pouvons dire : Dieu le veut ! Non, le passé ne prévaudra pas. Eût-il la force, nous avons la justice, et la justice est plus forte que la force. Nous sommes la philosophie et la liberté. Non, tout le moyen âge condensé dans le Syllabus n’aura pas raison de Voltaire ; non, toute la monarchie, fût-elle triple, et eût-elle, comme l’hydre, trois têtes, n’aura pas raison de la république. (Non ! non ! non ! à gauche.) Le peuple, appuyé sur le droit, c’est Hercule appuyé sur la massue.

Et maintenant que la France reste en paix. Que le peuple demeure tranquille. Pour rassurer la civilisation, Hercule au repos suffit.

Je vote contre la catastrophe.

Je refuse la dissolution.

(Acclamation unanime et prolongée à gauche. — Les sénateurs de gauche se lèvent, et M. Victor Hugo, en regagnant sa place, est chaleureusement félicité par tous ses collègues. — La séance est suspendue.)