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CONGRÈS LITTÉRAIRE INTERNATIONAL.

S’il y a un héritier direct, le domaine public paie à cet héritier direct la redevance ; car remarquez que nous ne stipulons que pour l’héritier direct, et que tous les arguments qu’on fait valoir au sujet des héritiers collatéraux et de la difficulté qu’on aurait à les découvrir, s’évanouissent.

Mais, à l’extinction des héritiers directs, que se passe-t-il ?

Le domaine public va-t-il continuer d’exploiter l’œuvre sans payer de droits, puisqu’il n’y a plus d’héritiers directs ? Non ; selon moi, il continuerait d’exploiter l’œuvre en continuant de payer la redevance.

À qui ?

C’est ici, messieurs, qu’apparaît surtout l’utilité de la redevance perpétuelle.

Rien ne serait plus utile, en effet, qu’une sorte de fonds commun, un capital considérable, des revenus solides, appliqués aux besoins de la littérature en continuelle voie de formation. Il y a beaucoup de jeunes écrivains, de jeunes esprits, de jeunes auteurs, qui sont pleins de talent et d’avenir, et qui rencontrent, au début, d’immenses difficultés. Quelques-uns ne percent pas, l’appui leur a manqué, le pain leur a manqué. Les gouvernements, je l’ai expliqué dans mes premières paroles publiques, ont créé le système des pensions, système stérile pour les écrivains. Mais supposez que la littérature française, par sa propre force, par ce décime prélevé sur l’immense produit du domaine public, possède un vaste fonds littéraire, administré par un syndicat d’écrivains, par cette société des gens de lettres qui représente le grand mouvement intellectuel de l’époque ; supposez que votre comité ait cette très grande fonction d’administrer ce que j’appellerai la liste civile de la littérature. Connaissez-vous rien de plus beau que ceci : toutes les œuvres qui n’ont plus d’héritiers directs tombent dans le domaine public payant, et le produit sert à encourager, à vivifier, à féconder les jeunes esprits ! (Adhésion unanime.)