Page:Hugo - Actes et paroles - volume 6.djvu/89

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
79
LA LIBÉRATION DU TERRITOIRE.

Car il faut, lorsqu’on voit les soldats de la France,
Qu’on dise : — C’est la gloire et c’est la délivrance !
C’est Jemmapes, l’Argonne, Ulm, Iéna, Fleurus !
C’est un tas de lauriers au soleil apparus !
Regardez. Ils ont fait les choses impossibles.
Ce sont les bienfaisants, ce sont les invincibles.
Ils ont pour murs les monts et le Rhin pour fossé.
En les voyant, il faut qu’on dise : — Ils ont chassé
Les rois du nord, les rois du sud, les rois de l’ombre,
Cette armée est le roc vainqueur des flots sans nombre,
Et leur nom resplendit du zénith au nadir ! —
Il faut que les tyrans tremblent, loin d’applaudir.
Il faut qu’on dise : — Ils sont les amis vénérables
Des pauvres, des damnés, des serfs, des misérables,
Les grands spoliateurs des trônes, arrachant
Sceptre, glaive et puissance à quiconque est méchant ;
Ils sont les bienvenus partout où quelqu’un souffre.
Ils ont l’aile de flamme habituée au gouffre.
Ils sont l’essaim d’éclairs qui traverse la nuit.
Ils vont, même quand c’est la mort qui les conduit.
Ils sont beaux, souriants, joyeux, pleins de lumière ;
Athène en serait folle et Sparte en serait fière. —
Il faut qu’on dise : — Ils sont d’accord avec les cieux !
Et que l’homme, adorant leur pas audacieux,
Croie entendre, au-dessus de ces légionnaires
Qui roulent leurs canons, Dieu rouler ses tonnerres !

C’est pourquoi j’attendrais.

*

C’est pourquoi j’attendrais.Qu’attends-tu ? — Je réponds :
J’attends l’aube ; j’attends que tous disent : — Frappons !