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DEPUIS L’EXIL. — PARIS.

De là une colère ; de là un conflit. Ne croyez pas que je cherche ici à rien atténuer. Oui, — et je n’ai pas attendu à aujourd’hui pour le dire, entendez-vous bien ? — oui, l’assassinat des généraux Lecomte et Clément Thomas est un crime, comme l’assassinat de Baudin et Dussoubs est un crime ; oui, l’incendie des Tuileries et de l’Hôtel de Ville est un crime comme la démolition de la salle de l’Assemblée nationale est un crime ; oui, le massacre des otages est un crime comme le massacre des passants sur le boulevard est un crime (applaudissements à l’extrême gauche) ; oui, ce sont là des crimes ; et s’il s’y joint cette circonstance qu’on est repris de justice, et qu’on a derrière soi, par exemple, le coup de pistolet au capitaine Col-Puygellier, le cas est plus grave encore ; j’accorde tout ceci, et j’ajoute : ce qui est vrai d’un côté est vrai de l’autre. (Très bien ! à l’extrême gauche.)

Il y a deux groupes de faits séparés par un intervalle de vingt ans, le fait du 2 Décembre et le fait du 18 Mars. Ces deux faits s’éclairent l’un par l’autre ; ces deux faits, politiques tous les deux, bien qu’avec des causes absolument différentes, contiennent l’un et l’autre ce que vous appelez des délits communs.

Cela posé, j’examine. Je me mets en face de la justice.

Évidemment pour les mêmes délits, la justice aura été la même ; ou, si elle a été inégale dans ses arrêts, elle aura considéré d’un côté, qu’une population qui vient d’être héroïque devant l’ennemi devait s’attendre à quelque ménagement, qu’après tout les crimes à punir étaient le fait, non du peuple de Paris, mais de quelques hommes, et qu’enfin, si l’on examinait la cause même du conflit, Paris avait, certes, droit à l’autonomie, de même qu’Athènes qui s’est appelée l’Acropole, de même que Rome qui s’est appelée Urbs, de même que Londres qui s’appelle la Cité ; la justice aura considéré d’un autre côté à quel point est abominable le guet-apens d’un parvenu quasi princier qui assassine pour régner ; et pesant d’un côté le droit, de l’autre l’usurpation,