comme tout astre, puis, tout à coup, lance un jet de clarté et reparaît.
La France avait deux grandeurs, sa grandeur matérielle et sa grandeur morale. Sa puissance matérielle seule est atteinte, sa puissance intellectuelle est entière. On amoindrit un territoire, non un rayonnement ; jamais un rayon ne rebrousse chemin. La civilisation connaît peu Berlin et continue de se tourner vers Paris. Après les désastres, voyons le résultat. Il ne reste plus à la France que ceci : tous les peuples. La France a perdu deux provinces, mais elle a gardé le monde.
C’est le phénomène d’Athènes, c’est le phénomène de Rome. Et cela tient à une chose profonde, l’Art. Être la nation de l’idéal, c’est être la nation du droit ; être le peuple du beau, c’est être le peuple du vrai.
Être un colosse n’est rien si l’on n’est un esprit. La Turquie a été colosse, la Russie l’est, l’empire allemand le sera ; énormités faites de ténèbres, géants reptiles. Le géant, plus les ailes, c’est l’archange. La France est suprême parce qu’elle est ailée et lumineuse. C’est parce qu’elle est la grande nation lettrée qu’elle est la grande nation révolutionnaire, La Marseillaise, qui est sa chanson, est aussi son épée. 1789 avait besoin de cette préface, l’Encyclopédie. Voltaire prépare Mirabeau. Ôtez Diderot, vous n’aurez pas Danton. Qui eût séché ce germe, Rousseau, au commencement du dix-huitième siècle, eût, par contrecoup, séché à la fin cet autre germe, Robespierre. Corrélations impénétrables, mystérieuses influences, complicités de l’idéal avec l’absolu, que le philosophe constate, mais qui ne sont pas justiciables des conseils de guerre.
Le journal, donc, comme l’écrivain, a deux fonctions, la fonction politique, la fonction littéraire. Ces deux fonctions, au fond, n’en sont qu’une ; car sans littérature pas de politique. On ne fait pas de révolutions avec du mauvais style. C’est parce qu’ils sont de grands écrivains que Juvénal assainit Rome et que Dante féconde Florence.