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DEPUIS L’EXIL. — PARIS.

son malheur, avait voulu suivre à pied. Il marchait derrière le char, donnant le bras à son frère.

« Le cortège a pris la rue de Rivoli et s’est dirigé vers le cimetière du Père-Lachaise par la rue Saint-Antoine, la place de la Bastille et la rue de la Roquette. Sur tout ce parcours, les trottoirs et la chaussée étaient couverts d’une multitude respectueuse et cordiale.

« Quant au cortège, il se composait de tout ce qu’il y a de républicains dans les deux Chambres, dans le conseil municipal et dans la presse. Nous n’avons pas besoin de dire que la rédaction du Rappel y était au complet.

« Sur tout le trajet, Victor Hugo a été l’objet de l’ovation que le peuple ne manque jamais de lui faire. Il était dans une des voitures de deuil. Pendant quelque temps, la police a pu empêcher la foule de trop s’approcher des roues. Mais à partir de la place de la Bastille, rien n’a pu retenir hommes et femmes de se presser à la portière, de serrer la main qui a écrit les Châtiments et Quatrevingt-Treize, de faire embrasser au grand poëte les petits enfants.

« De la place de la Bastille au cimetière, ç’a été une acclamation non interrompue : « Vive Victor Hugo ! Vive la république ! Vive l’amnistie ! » Devant la prison de la Roquette, une femme a crié : « Vive l’abolition de la peine de mort ! »

« Lorsqu’on est arrivé au cimetière, l’immense foule qui suivait le corbillard y a trouvé une nouvelle foule non moins immense. Ce n’est pas sans difficulté que le cortège a pu arriver à la fosse, creusée tout en haut du cimetière, derrière la chapelle.

« Le corps descendu dans la fosse, M. le pasteur Auguste Dide a pris la parole, Mme Louis Blanc était de la religion réformée. M. Dide a dit avec éloquence ce qu’à été pour Louis Blanc celle qu’il a perdue, dans la proscription, pendant le siége et depuis.

« La chaleureuse harangue de M. Dide a produit une vive et universelle impression. »

Ensuite Victor Hugo a parlé :

DISCOURS DE VICTOR HUGO.

Ce que Louis Blanc a fait pour moi il y a deux ans, je le fais aujourd’hui pour lui. Je viens dire en son nom l’adieu suprême à un être aimé. L’ami qui a encore la force de