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DEPUIS L’EXIL. — PARIS.

d’affirmer le droit devant la force, d’affirmer la France devant le germanisme, d’affirmer Paris devant Rome, d’affirmer la lumière devant la nuit.

Vous le ferez.

Un mot encore.

Dissipons les illusions. Dissipons-les sans colère, avec le calme de la certitude. Ceux qui rêvent d’abolir légalement dans un temps quelconque la république, se trompent. La république préexiste. Elle est de droit naturel. On ne vote pas pour ou contre l’air qu’on respire. On ne met pas aux voix la loi de croissance du genre humain.

Les monarchies, comme les tutelles, peuvent avoir leur raison d’être, tant que le peuple est petit. Parvenu à une certaine taille, le peuple se sent de force à marcher seul, et il marche. Une république, c’est une nation qui se déclare majeure. La révolution française, c’est la civilisation émancipée. Ces vérités sont simples.

La croissance est une délivrance. Cette délivrance ne dépend de personne ; pas même de vous. Mettez-vous aux voix l’heure où vous avez vingt et un ans ? Le peuple français est majeur. Modifier sa constitution est possible. Changer son âge, non. Le remettre en monarchie, ce serait le remettre en tutelle. Il est trop grand pour cela.

Qu’on renonce donc aux chimères.

Acceptons la virilité. La virilité, c’est la république. Acceptons-la pour nous, désirons-la pour les autres. Souhaitons aux autres peuples la pleine possession d’eux-mêmes. Offrons-leur cette inébranlable base de paix, la fédération. La France aime profondément les nations ; elle se sent sœur aînée. On la frappe, on la traite comme une enclume, mais elle étincelle sous la haine ; à ceux qui veulent lui faire une blessure, elle envoie une clarté ; c’est sa façon de rendre coup pour coup. Faire du continent une famille ; délivrer le commerce que les frontières entravent, l’industrie que les prohibitions paralysent, le travail que les parasitismes exploitent, la propriété que les impôts