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LA QUESTION DE PARIS.

Un million de vandales ne l’a pas étonné. Paris s’est dévoué pour tous ; il a été la ville superbe du sacrifice. Voilà ce qu’il vous a fait. Il a plus que sauvé la vie à la France, il lui a sauvé l’honneur.

Et vous vous défiez de Paris ! et vous mettez Paris en suspicion !

Vous mettez en suspicion le courage, l’abnégation, le patriotisme, la magnifique initiative de la résistance dans le désespoir, l’intrépide volonté d’arracher à l’ennemi la France, toute la France ! Vous vous défiez de cette cité qui a fait la philosophie universelle, qui envahit le monde à votre profit par son rayonnement et qui vous le conquiert par ses orateurs, par ses écrivains, par ses penseurs ; de cette cité qui a donné l’exemple de toutes les audaces et aussi de toutes les sagesses ; de ce Paris qui fera l’univers à son image, et d’où est sorti l’exemplaire nouveau de la civilisation ! Vous avez peur de Paris, de Paris qui est la fraternité, la liberté, l’autorité, la puissance, la vie ! Vous mettez en suspicion le progrès ! Vous mettez en surveillance la lumière !

Ah ! songez-y !

Cette ville vous tend les bras ; vous lui dites : Ferme tes portes. Cette ville vient à vous, vous reculez devant elle. Elle vous offre son hospitalité majestueuse où vous pouvez mettre toute la France à l’abri, son hospitalité, gage de concorde et de paix publique, et vous hésitez, et vous refusez, et vous avez peur du port comme d’un piége !

Oui, je le dis, pour vous, pour nous tous, Paris, c’est le port.

Messieurs, voulez-vous être sages, soyez confiants. Voulez-vous être des hommes politiques, soyez des hommes fraternels.

Rentrez dans Paris, et rentrez-y immédiatement.

Paris vous en saura gré et s’apaisera. Et quand Paris s’apaise, tout s’apaise.

Votre absence de Paris inquiétera tous les intérêts et sera pour le pays une cause de fièvre lente.