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LES RUES ET MAISONS DU VIEUX BLOIS.

mais la ville des maisons[1]. Avec vous, on est dans la rue ; avec vous, on entre dans la masure ; et telle de ces bâtisses décrépites, comme le logis en bois sculpté de la rue Saint-Lubin, comme l’hôtel Denis-Dupont avec sa lanterne d’escalier à baies obliques suivant le mouvement de la vis de saint Gilles, comme la maison de la rue Haute, comme l’arcade surbaissée de la rue Pierre-de-Blois, étale toute la fantaisie gothique ou toutes les grâces de la renaissance, augmentées de la poésie du délabrement. Être une masure, cela n’empêche pas d’être un bijou. Une vieille femme qui a du cœur et de l’esprit, rien n’est plus charmant. Beaucoup des exquises maisons dessinées par vous sont cette vieille femme-là. On fait avec bonheur leur connaissance. On les revoit avec joie, quand on est, comme moi, leur vieil ami. Que de choses elles ont à vous dire, et quel délicieux rabâchage du passé ! Par exemple, regardez cette fine et délicate maison de la rue des Orfèvres, il semble que ce soit un tête-à-tête. On est en bonne fortune avec toute cette élégance. Vous nous faites tout reconnaître, tant vos eaux-fortes sont des portraits. C’est la fidélité photographique, avec la liberté du grand art. Votre rue Chemonton est un chef-d’œuvre. J’ai monté, en même temps que ces bons paysans de Sologne peints par vous, les grands degrés du château. La maison à statuettes de la rue Pierre-de-Blois est comparable à la précieuse maison des Musiciens de Weymouth. Je retrouve tout. Voici la tour d’Argent, voici le haut pignon sombre, coin des rues des Violettes et de Saint-Lubin, voici l’hôtel de Guise, voici l’hôtel de Cheverny, voici l’hôtel Sardini avec ses voûtes en anse de panier, voici l’hôtel d’Alluye avec ses galantes arcades du temps de Charles VIII, voici les degrés de Saint-Louis qui mènent à la cathédrale, voici la rue du Sermon, et au fond la silhouette presque romane de Saint-Nicolas ; voici la jolie tourelle à pans coupés dite Oratoire de la reine Anne. C’est derrière cette tourelle qu’était le jardin où Louis XII, goutteux, se promenait sur son petit mulet. Ce Louis XII a, comme Henri IV, des côtés aimables. Il fit beaucoup de sottises, mais c’était un roi bonhomme. Il jetait au Rhône

  1. Les Rues et Maisons du vieux Blois, eaux-fortes par A. Queyroy.