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LE RAPPEL.

blais. J’ai, heureusement pour moi, la réputation d’être bête. Ceci me sauva. M. Victor Hugo ne sait ce qu’il dit ! cria un membre compatissant de la majorité. Cette parole indulgente jeta un charme, tout s’apaisa, M. Dupin garda sa foudre dans sa poche. (C’est là que volontiers il mettait son drapeau. Vaste poche. Dans l’occasion, il se fût caché dedans s’il avait pu.) Mais convenez que j’avais abusé du droit de réplique. Donc, respectons-le.

C’était du reste un temps singulier. On était en république, et vive la république était un cri séditieux. Vous, vous étiez en prison, tous, excepté Rochefort, qui était alors au collège, mais qui aujourd’hui est en Belgique.

Vous encouragerez le jeune et rayonnant groupe de poëtes qui se lève aujourd’hui avec tant d’éclat, et qui appuie de ses travaux et de ses succès toutes les grandes affirmations du siècle. Aucune générosité ne manquera à votre œuvre. Vous donnerez le mot d’ordre de l’espérance à cette admirable jeunesse d’aujourd’hui qui a sur le front la candeur loyale de l’avenir. Vous rallierez dans l’incorruptible foi commune cette studieuse et fière multitude d’intelligences toutes frémissantes de la joie d’éclore, qui, le matin peuple les écoles, et le soir les théâtres, ces autres écoles ; le matin, cherchant le vrai dans la science ; le soir, applaudissant ou réclamant le grand dans la poésie et le beau dans l’art. Ces nobles jeunes hommes d’à présent, je les connais et je les aime. Je suis dans leur secret et je les remercie de ce doux murmure que, si souvent, comme une lointaine troupe d’abeilles, ils viennent faire à mon oreille. Ils ont une volonté mystérieuse et ferme, et ils feront le bien, j’en réponds. Cette jeunesse, c’est la France en fleur, c’est la Révolution redevenue aurore. Vous communierez avec cette jeunesse. Vous éveillerez avec tous les mots magiques : devoir, honneur, raison, progrès, patrie, humanité, liberté, cette forêt d’échos qui est en elle. Répercussion profonde, prête à toutes les grandes réponses.

Mes amis, et vous, mes fils, allez ! Combattez votre vaillant combat. Combattez-le sans moi et avec moi. Sans moi, car ma vieille plume guerroyante ne sera pas parmi les vôtres ; avec moi, car mon âme y sera. Allez, faites, vivez,