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nous attendons ; tout ce que nous pouvons dire et répéter, c’est qu’il nous semble que la date libératrice approche. On ne distingue pas le chiffre, mais on voit le rayonnement.

Proscrits ! levons nos fronts pour que ce rayonnement les éclaire !

Levons nos fronts, pour que, si les peuples demandent : — Qu’est-ce donc qui blanchit de la sorte le haut du visage de ces hommes ? — on puisse répondre : — C’est la clarté de la révolution qui vient !

Levons nos fronts, proscrits, et, comme nous l’avons fait si souvent dans notre confiance religieuse, saluons l’avenir !

L’avenir a plusieurs noms.

Pour les faibles, il se nomme l’impossible ; pour les timides, il se nomme l’inconnu ; pour les penseurs et pour les vaillants, il se nomme l’idéal.

L’impossible !

L’inconnu !

Quoi ! plus de misère pour l’homme, plus de prostitution pour la femme, plus d’ignorance pour l’enfant, ce serait l’impossible !

Quoi ! les États-Unis d’Europe, libres et maîtres chacun chez eux, mus et reliés par une assemblée centrale, et communiant à travers les mers avec les États-Unis d’Amérique, ce serait l’inconnu !

Quoi ! ce qu’a voulu Jésus-Christ, c’est l’impossible !

Quoi ! ce qu’a fait Washington, c’est l’inconnu !

Mais on nous dit : — Et la transition ! et les douleurs de l’enfantement ! et la tempête du passage du vieux monde au monde nouveau ! un continent qui se transforme ! l’avatar d’un continent ! Vous figurez-vous cette chose redoutable ? la résistance désespérée des trônes, la colère des castes, la furie des armées, le roi défendant sa liste civile, le prêtre défendant sa prébende, le juge défendant sa paie, l’usurier défendant son bordereau, l’exploiteur défendant son privilège, quelles ligues ! quelles luttes ! quels ouragans ! quelles batailles ! quels obstacles ! Préparez vos yeux à répandre des larmes ; préparez vos veines à verser du sang ! arrêtez-vous ! reculez !… — Silence aux