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AVANT L’EXIL. — ASSEMBLÉE LÉGISLATIVE.

reconnaître et de proclamer par un vote solennel, par un vote qui sera un arrêt, la puissance et la sainteté de la pensée. Dans cette tentative contre la presse, tout le péril est pour la société. (Oui ! oui !) Quel coup prétend-on porter aux idées avec une telle loi, et que leur veut-on ? Les comprimer ? Elles sont incompressibles. Les circonscrire ? Elles sont infinies. Les étouffer ? Elles sont immortelles. (Longue sensation.) Oui ! elles sont immortelles ! Un orateur de ce côté l’a nié un jour, vous vous en souvenez, dans un discours où il me répondait ; il s’est écrié que ce n’étaient pas les idées qui étaient immortelles, que c’étaient les dogmes, parce que les idées sont humaines, disait-il, et que les dogmes sont divins. Ah ! les idées aussi sont divines ! et, n’en déplaise à l’orateur clérical…. (Violente interruption à droite. — M. deMontalembert s’agite.)

À droite. — À l’ordre ! c’est intolérable. (Cris.)

M. le président. — Est-ce que vous prétendez que M. de Montalembert n’est pas représentant au même titre que vous ? (Bruit.) Les personnalités sont défendues.

Une voix déjà gauche. — M. le président s’est réveillé.

M. Charras. — Il ne dort que lorsqu’on attaque la révolution.

Une voix déjà gauche. — Vous laissez insulter la république !

M. le président. — La république ne souffre pas et ne se plaint pas.

M. Victor Hugo. — Je n’ai pas supposé un instant, messieurs, que cette qualification pût sembler une injure à l’honorable orateur auquel je l’adressais. Si elle lui semble une injure, je m’empresse de la retirer.

M. le président. — Elle m’a paru inconvenante.

(M. de Montalembert se lève pour répondre.)

Voix à droite. — Parlez ! parlez !

À gauche. — Ne vous laissez pas interrompre, monsieur Victor Hugo !

M. le président. — Monsieur de Montalembert, laissez achever le discours ; n’interrompez pas. Vous parlerez après.

Voix à droite. — Parlez ! parlez !

Voix à gauche. — Non ! non !