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VIII

LA LIBERTÉ DU THÉÂTRE[1]

3 avril 1849.

Je regrette que cette grave question, qui divise les meilleurs esprits, surgisse d’une manière si inopinée. Pour ma part, je l’avoue franchement, je ne suis pas prêt à la traiter et à l’approfondir comme elle devrait être approfondie ; mais je croirais manquer à un de mes plus sérieux devoirs, si je n’apportais ici ce qui me paraît être la vérité et le principe.

Je n’étonnerai personne dans cette enceinte en déclarant que je suis partisan de la liberté du théâtre.

Et d’abord, messieurs, expliquons-nous sur ce mot. Qu’entendons-nous par là ? Qu’est-ce que c’est que la liberté du théâtre ?

Messieurs, à proprement parler, le théâtre n’est pas et ne peut jamais être libre. Il n’échappe à une censure que pour retomber sous une autre, car c’est là le véritable nœud de la question, c’est sur ce point que j’appelle spécialement l’attention de M. le ministre de l’intérieur. Il existe deux sortes de censures. L’une, qui est ce que je connais au monde de plus respectable et de plus efficace, c’est la censure exercée au nom des idées éternelles d’honneur, de décence et d’honnêteté, au nom de ce respect qu’une

  1. Ce discours fut prononcé dans la discussion du budget, après un discours dans lequel le représentant Jules Favre demanda pour les théâtres l’abolition de toute censure.