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AVANT L’EXIL. — ASSEMBLÉE CONSTITUANTE.

M. Victor Hugo. — Je n’irai pas aussi loin que votre comité de législation, et je dirai à M. le ministre de la justice qu’il serait, à mon sens, d’une bonne politique d’alléger peu à peu l’état de siége, et de le rendre de jour en jour moins pesant, afin de préparer la transition, et d’amener par degrés insensibles l’heure où l’état de siége pourrait être levé sans danger. (Adhésion sur plusieurs bancs.)

Maintenant, j’entre dans la question de la liberté de la presse, et je dirai à M. le ministre de la justice que, depuis la dernière discussion, cette question a pris des aspects nouveaux. Pour ma part, plus nous avançons dans l’œuvre de la constitution, plus je suis frappé de l’inconvénient de discuter la constitution en l’absence de la liberté de la presse. (Bruit et interruptions diverses.)

Je dis dans l’absence de la liberté de la presse, et je ne puis caractériser autrement une situation dans laquelle les journaux ne sont point placés et maintenus sous la surveillance et la sauvegarde des lois, mais laissés à la discrétion du pouvoir exécutif. (C’est vrai !)

Eh bien, messieurs, je crains que, dans l’avenir, la constitution que vous discutez ne soit moralement amoindrie. (Dénégation. Adhésion sur plusieurs bancs.)

M. Dupin (de la Nièvre). — Ce ne sera pas faute d’amendements et de critiques.

M. Victor Hugo. — Vous avez pris, messieurs, deux résolutions graves dans ces derniers temps ; par l’une, à laquelle je ne me suis point associé, vous avez soumis la république à cette périlleuse épreuve d’une assemblée unique ; par l’autre, à laquelle je m’honore d’avoir concouru, vous avez consacré la plénitude de la souveraineté du peuple, et vous avez laissé au pays le droit et le soin de choisir l’homme qui doit diriger le gouvernement du pays. (Rumeurs.) Eh bien, messieurs, il importait dans ces deux occasions que l’opinion publique, que l’opinion du dehors pût prendre la parole, la prendre hautement et librement, car c’étaient là, à coup sûr, des questions qui lui appartenaient. (Très bien !) L’avenir, l’avenir immédiat de votre constitution amène d’autres questions graves. Il serait malheureux qu’on pût dire que, tandis que tous les