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suis à votre discrétion. Vous n’avez qu’à appeler, je suis pincé, qu’à jeter un cri, je suis pris, qu’à dire un mot, je suis flambé. Il dépend de vous de souffler sur moi, et me voilà perdu. C’est moi qui aurais le droit d’avoir peur de vous. Je n’en use pas. Je donne l’exemple de la confiance. Écoutez. Je suis un homme qui se sauve. Pourquoi ? Parce qu’on court après moi. Pourquoi court-on après moi ? Parce que j’étais dans la rue. Pourquoi étais-je dans la rue ? Parce que je m’imaginais qu’on peut être dans la rue. Qui suis-je ? Un innocent, pour le quart d’heure. Qu’est-ce que je faisais ? Rien. Qu’est-ce qu’on veut me faire ? Tout. Car qui n’a pas la liberté, n’a plus la vie. Voilà mon histoire. Vous ne la comprenez pas. Ni moi non plus.

CYPRIENNE.

Monsieur, j’ai là mon grand-père malade, qui dort.

GLAPIEU.

Honneur et respect. Je ne suis pas l’ennemi des grands-pères, étant l’ami des petites-filles. Si je vous fais peur, c’est bien malgré moi, car je vous assure que je fais ce que je peux pour être aimable.

CYPRIENNE, à part.

Il est laid. Mais il n’a pas l’air très méchant.

GLAPIEU.

Mademoiselle, qu’y a-t-il de l’autre côté, derrière la maison ?

CYPRIENNE.

Il y a une église.

CYPRIENNE.

Une église. Bon, C’est inhabité. C’est commode pour passer.

GLAPIEU.

Nous sommes rue Saint-Antoine. C’est l’église Saint-Gervais et Saint-Protais.

CYPRIENNE, à part.

Protêt ! Me croit-elle poursuivi par les huissiers. ? Serait-ce une allusion ? Faire des calembours dans un âge si tendre !

Haut.

Mademoiselle…