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Ceci écrit, Victor Hugo s’est ravisé ; il a compris tous les inconvénients qu’il y avait à instruire sitôt Gilbert de la trahison de Jane ; il a cherché, il a trouvé tout le mouvement de sa fin d’acte, il a biffé ce développement et l’a remplacé par quelques phrases rapides où le Juif s’assure simplement que l’ouvrier sera là tout prêt à lui venir en aide. — La chanson de Fabiano a été ajoutée après coup ; les deux premières strophes sont, dans le manuscrit, seules de la main de Victor Hugo. — Il manque au manuscrit, dans la scène du Juif et de Fabiano, une retouche importante ; elle a dû être reportée seulement sur les épreuves imprimées ; c’est l’explication, très utile et abondante en détails amusants, que donne le Juif au sujet des papiers de lord Talbot et du prix qu’il en réclame. Le manuscrit se bornait à ces indications sommaires :

FABIANI.

Que veux-tu faire de ce blanc-seing ?

L’HOMME.

Ce qui me plaira.

FABIANI.

Drôle, je ne puis te donner ce blanc-seing, etc.

Le second acte avait été achevé le 22 août. Le lendemain 23, Victor Hugo, selon son habitude, se mit en devoir d’écrire le troisième, qu’il divisait en deux parties. Il semble avoir voulu débuter par une scène entre Simon Renard et Éneas Dulverton. Mais, cette fois encore, il s’arrête : il ne voyait pas assez clair dans la marche de cet acte. Tout ce jour et le jour suivant il demeure sans écrire, pour établir sans doute l’ordre des scènes et la suite des idées. Il reprend la plume seulement le 25 août et met encore six jours pleins rien que pour terminer la première partie de l’acte, qui n’est pourtant pas la meilleure du drame.

La première scène est entre Gilbert et Joshua. On y lit, dans le manuscrit, le passage suivant, retranché dans la brochure :

GILBERT.

…Je voudrais mourir. Aie pitié de moi, Joshua.

JOSHUA.

Tu es fou, Gilbert ! ne songe plus à cette femme qui a perdu deux hommes. Hélas ! tu n’as plus beaucoup de temps devant toi pour y songer. Gilbert, ce n’est plus à une femme qu’il faut penser maintenant, c’est à Dieu.

GILBERT, se parlant à lui-même.

Le cachot de Fabiani est là, le mien est ici. Pour qui vient-elle ? — Bah ! pour Fabiani ! Le jour de notre condamnation à mort, Joshua, quand nous avons traversé pour revenir à la Tour ce long corridor encombré de foule, nous marchions en cérémonie, le bourreau nous précédant, la hache tournée vers notre visage, comme cela se fait pour les condamnés à mort, tu sais ; à l’angle du corridor, il y a eu un cri sur