Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Théâtre, tome III.djvu/126

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

SIMON RENARD.

Qui sait ?

FABIANO.

Que voulez-vous dire ?

SIMON RENARD.

Dans des temps de proscriptions comme ceux où nous vivons, il y a dans l’ombre bien des existences déchues qui peuvent se relever. La reine est d’une mauvaise santé. Sa vie tient à une fièvre, sa faveur à une fantaisie. Une pairesse, par exemple, dont on serait le mari vaut mieux qu’une reine dont on ne serait que l’amant.

FABIANO.

Est-ce que cette jeune fille serait ?…

SIMON RENARD.

Rien. Elle n’est rien. Qu’une fille d’artisan. Point de conjectures. Sachez seulement que depuis dix ans que je suis dans ce pays pas un homme dépositaire d’un secret d’état n’est descendu dans la tombe avant de me l’avoir confié. Je sais bien des choses dont j’use dans l’occasion. J’aurais voulu dans votre existence quelque chose de plus stable que le caprice d’une reine capricieuse. Je suis votre ami.

FABIANO.

Je crois vous comprendre.

SIMON RENARD

Le voilà déjà tout pensif.

La harangue du constable est terminée. Simon Renard marche à la rencontre de la reine.

LA REINE.

Voilà un beau soleil, messieurs. — Monsieur le lieutenant d’Amont, ce premier jour de l’année est bien joyeux.

SIMON RENARD.

Il est bien sombre, madame, pour un pauvre misérable dont il est le dernier jour.

LA REINE.

Qui donc ?

SIMON RENARD.

Lord Clanbrassil.

LA REINE.

Je défends qu’on me parle de cet homme.

SIMON RENARD.

Pardon, madame.