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CROMWELL.
LORD ORMOND, se levant.

Que Dieu conserve lord Broghill !


LORD BROGHILL, l’examinant d’un air dédaigneux de la tête aux pieds.

Quoi ! c’est donc toi, l’ami, qui me fais à cette heure
Pour ce bouge enfumé déserter ma demeure !
Dis ton nom. D’où viens-tu ? pourquoi ? de quelle part ?
Que me veux-tu ? — J’ai vu cet homme quelque part.


LORD ORMOND.

Lord Broghill !


LORD BROGHILL.

Réponds donc ! les marauds de ta sorte

Sont faits pour amuser nos gens à notre porte ;
Et c’est là tout l’honneur, pour les traiter fort bien.
Que ceux de notre rang doivent à ceux du tien.
Je te trouve hardi !


LORD ORMOND.

Mylord, sans vous déplaire,

Sont-ce là les discours d’un seigneur populaire ?
D’un ami de Cromwell ?


LORD BROGHILL.

Cromwell, vieux puritain,

Si tu le réveillais par hasard si matin.
Te ferait, pour changer le cours de tes idées,
Pendre à quelque gibet, haut de trente coudées.


LORD ORMOND, à part.

Plutôt que l’éveiller, j’espère l’endormir !


LORD BROGHILL.

Cromwell, qui sur le trône enfin va s’affermir,
Saura bien châtier la canaille insolente…


LORD ORMOND.

Son trône est un billot, et sa pourpre est sanglante.
Transfuge serviteur des Stuarts, je le vois.
Vous l’avez oublié.