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Où, comme il est écrit du sacré lampadaire,
L’art du sculpteur s’unit à l’art du lapidaire !
Cromwell de ce clinquant veut s’entourer encor.
— Quand je dis ce clinquant, c’est bien de très bon or !
— Or vierge de Hongrie, — et ces glands magnifiques
Pourraient faire les frais de quatre républiques !
C’est moi qui les fournis ; et, s’ils étaient moins lourds,
Leur mesquine splendeur souillerait ce velours. —
Velours d’Espagne ! — Allons, qu’il règne, mais qu’il meure !
Que la couronne ici pare sa dernière heure !

Essayons sur son front le clou de Sisara. —
Il regarde les coussins du trône.
Velours que j’ai payé cinq piastres la vara ! —

Je le revendrai dix, suivant la mode antique. —
Cet Aod est pourtant une bonne pratique !
Oui ; mais son avarice !... — Il touche à son trépas.
Ces royaux échelons vont rompre sous ses pas.
Sous ce dais triomphal, sous ces tentures même
Où son blason bourgeois usurpe un diadème.

Que cette place est bonne à le bien poignarder !
Il se promène de long en large devant le trône, et son visage passe de la fureur à l’admiration pour la richesse des ornements qui le décorent.
Mais c’est qu’il est capable encor de marchander !

De faire par Maynard mutiler mon mémoire !
Rogner les brocarts d’or ! déprécier la moire !
Puis, si j’ose me plaindre, alors sa bonne foi
Prête ses gens de guerre à ses hommes de loi.
Servez ces pharaons ! toujours l’ingratitude
Est de leurs cœurs glacés la première habitude.
Il devrait cependant être content de moi !
Pour bien parodier la majesté d’un roi,
Rien ne manque à ce trône abominable au monde,
À ce hideux théâtre, à cet autel immonde.
C’est magnifique ! — Enfin, je n’ai rien épargné.
À décorer Moloch je me suis résigné,
Et j’expose aux périls qui suivent l’anathème
Mes tapis de Turquie et mon cuir de Bohême. —

Jébuséen ! qu’il meure !
Comme frappé d’une idée soudaine.
— Oui, mais qui me paiera
Quand il n’y sera plus ? — L’auguste Débora

Ne laissa point son clou dans le front de l’impie ;
Samson ne risquait rien, quand sa force assoupie