Je le sais. C’est tout simple ! et je vous en approuve.
Tout en vous approuvant, à dire vrai, je trouve
Que votre plan pouvait être un peu mieux conçu.
Et qu’enfin votre trame est d’un frêle tissu.
Par malheur, je n’ai point su la chose à temps, frères,
Pour vous communiquer sur ce point mes lumières ;
Ne m’en veuillez donc pas, — Vous avez bien sué
Pour inventer cela ! — Moi, comme Josué,
Que de vingt rois unis le choc ne troublait guère.
J’ai coupé les jarrets à vos chevaux de guerre.
Nous avons tous agi comme nous avons dû ;
Vous avez attaqué, je me suis défendu.
Quant à votre projet en lui-même, j’avoue
Que j’aime ces élans du cœur qui se dévoue ;
Le courage me rit et l’audace me plaît.
Quoique votre succès n’ait pas été complet,
Je ne vous place pas moins haut dans mon idée.
Par un sentiment fort votre âme est possédée ;
Vous marchez hardiment, d’un pas ferme et réglé ;
Vous n’avez point fléchi, point pâli, point tremblé ;
Vous m’êtes, — agréez mes compliments sincères, —
Des ennemis de choix, de dignes adversaires ;
Je ne vois rien en vous qui soit à dédaigner,
Et vous estime enfin trop — pour vous épargner.
Cette estime pour vous en public veut s’épandre.
Et je vous la témoigne en vous faisant tous pendre. —
Point de remercîments ! — Excusez-moi plutôt
Quoiqu’il ne vaille pas la corde qu’il me coûte.
Il doit vous rendre grâce ; oui, certes ! car sans vous
C’est dur ; à des chrétiens mêler un déicide !
Avec les bons larrons confondre un Barabbas ! —
J’arrangerai la chose. — On le pendra plus bas. —
Çà, que chacun de vous maintenant me pardonne
De le payer si mal ; ce que j’ai, je le donne.
— Ce que je fais pour vous, je le sens, est bien peu ! —
Allez ; préparez-vous à rendre compte à Dieu ;
Nous sommes tous pécheurs, frères ! — Dans quelques heures.