Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Théâtre, tome I.djvu/334

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
CROMWELL, à part
Perfide !

MANASSÉ.
Enfin, Cromwell maudit,
Tu vas contre les juifs expier ton édit !
Fanatique ! hypocrite ! avare !
S’adressant à Cromwell.
Quelle honte !
Ce Protecteur, ce roi vérifiait un compte !

Ah ! ne me parlez point des bourgeois couronnés !
Dans un cercle si bas leurs esprits sont bornés !
Pas de festins brillants, pas de jeux, pas de fêtes,
Jamais d’emprunts ! — Aussi quel commerce vous faites !
Que si vous saisissez pour eux un brick suédois,
Ils scrutent votre poche, ils regardent vos doigts,
Et, pour tous les périls qu’entraînait l’entreprise.
Vous laissent tout au plus les trois quarts de la prise.

CROMWELL.
Mais c’est vous écorcher !
MANASSÉ.
C’est le mot. Rois mesquins !
Ils savent distinguer les besans des sequins !
CROMWELL.
C’est affreux !
MANASSÉ.
Ce Cromwell ! là, je vous le demande,
M’a-t-il pas une fois osé mettre à l’amende

Pour avoir, en prêtant à je ne sais quel taux,
Honnêtement doublé mes pauvres capitaux !

CROMWELL.
C’est grand’pitié.
MANASSÉ.
Seigneur, c’est tuer l’industrie !
De quoi se mêlait-il, ce tyran, je vous prie ?

De quel droit fermait-il, pour plaire à ses dévots,
Théâtres, jeux, concerts, bals, courses de chevaux,