Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Roman, tome VI.djvu/297

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
283
BOUTEILLE D’ENCRE QUI NE RÉUSSIT…

Marius y fit monter Cosette et s’y élança.

— Cocher, dit-il, rue de l’Homme-Armé, numéro 7.

Le fiacre partit.

— Ah ! quel bonheur ! fit Cosette, rue de l’Homme-Armé. Je n’osais plus t’en parler. Nous allons voir monsieur Jean.

— Ton père, Cosette ! ton père plus que jamais. Cosette, je devine. Tu m’as dit que tu n’avais jamais reçu la lettre que je t’avais envoyée par Gavroche. Elle sera tombée dans ses mains. Cosette, il est allé à la barricade pour me sauver. Comme c’est son besoin d’être un ange, en passant, il en a sauvé d’autres ; il a sauvé Javert. Il m’a tiré de ce gouffre pour me donner à toi. Il m’a porté sur son dos dans cet effroyable égout. Ah ! je suis un monstrueux ingrat. Cosette, après avoir été ta providence, il a été la mienne. Figure-toi qu’il y avait une fondrière épouvantable, à s’y noyer cent fois, à se noyer dans la boue, Cosette ! il me l’a fait traverser. J’étais évanoui ; je ne voyais rien, je n’entendais rien, je ne pouvais rien savoir de ma propre aventure. Nous allons le ramener, le prendre avec nous, qu’il le veuille ou non, il ne nous quittera plus. Pourvu qu’il soit chez lui ! Pourvu que nous le trouvions ! Je passerai le reste de ma vie à le vénérer. Oui, ce doit être cela, vois-tu, Cosette ? C’est à lui que Gavroche aura remis ma lettre. Tout s’explique. Tu comprends.

Cosette ne comprenait pas un mot.

— Tu as raison, lui dit-elle.

Cependant le fiacre roulait.