Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Roman, tome VI.djvu/258

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
244
LES MISÉRABLES. — JEAN VALJEAN.

il ne voulait pas creuser, il ne voulait pas approfondir ; il ne voulait pas se sonder lui-même. Il avait promis, il s’était laissé entraîner à promettre ; Jean Valjean avait sa promesse ; même à un forçat, surtout à un forçat, on doit tenir sa parole. Toutefois, son premier devoir était envers Cosette. En somme, une répulsion, qui dominait tout, le soulevait.

Marius roulait confusément tout cet ensemble d’idées dans son esprit, passant de l’une à l’autre, et remué par toutes. De là un trouble profond. Il ne lui fut pas aisé de cacher ce trouble à Cosette, mais l’amour est un talent, et Marius y parvint.

Du reste, il fit, sans but apparent, des questions à Cosette, candide comme une colombe est blanche, et ne se doutant de rien ; il lui parla de son enfance et de sa jeunesse, et il se convainquit de plus en plus que tout ce qu’un homme peut être de bon, de paternel et de respectable, ce forçat l’avait été pour Cosette. Tout ce que Marius avait entrevu et supposé était réel. Cette ortie sinistre avait aimé et protégé ce lys.