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NOTES DE L’ÉDITEUR.

L’éditeur comprenait merveilleusement ses intérêts ; Victor Hugo n’avait rien à répondre à des propositions aussi modestes. D’ailleurs le moment n’était pas venu.

Le 23 janvier 1857, Hetzel, mis en appétit par le succès des Contemplations, pressait Victor Hugo de le laisser négocier l’affaire des Misérables :

Je puis voir Renduel, je croirais bon même d’entrer dès à présent en pourparlers avec lui ; il a été chez Villemot qui avait, comme tout le monde, parlé des Misérables comme s’ils étaient prêts à paraître. Renduel dit que c’est lui et non Gosselin qui est votre ayant droit pour vos deux premiers volumes de roman.

Faut-il éclaircir cela ?

Enfin croyez-vous qu’il soit bon de tenter cette affaire des Misérables ?

Si oui, écrivez-moi vos idées et donnez-moi, non pas pouvoir de traiter définitivement, mais d’entrer en pourparlers, et de traiter, sauf votre aveu.


Il est probable que Victor Hugo n’envoya pas le moindre pouvoir et resta muet en ce qui concernait son roman, car deux mois après, le 17 mars, Hetzel le mit presque en demeure de s’expliquer :

Si vous étiez prêt pour le roman les Misérables, j’irais vous trouver dans un mois ou deux pour vous en causer ; j’ai à ce sujet trop d’idées et de projets divers pour entreprendre de les fournir hypothétiquement sur ce papier.


À défaut des Misérables, il demandait à Victor Hugo, dans cette même lettre, les Petites Épopées dont il avait été question lors de son voyage à Guernesey dans l’été de 1856 ; il les obtint et signa le traité le 11 septembre 1857.

En 1858 et en 1859 Hetzel fut tout entier absorbé par l’impression et la publication des Petites Épopées qui devaient s’appeler la Légende des Siècles.

Le 20 juin 1860, il venait avec Émile Deschanel à Guernesey et traitait pour l’édition Hachette des œuvres de Victor Hugo (15 ou 18 volumes in-18 à 3 fr. 50), avec l’arrière-pensée qu’il pourrait introduire prochainement les Misérables dans cette édition des œuvres complètes ; il partait le 21, certain que Victor Hugo n’avait pris encore aucun engagement au sujet de son roman ; toutefois il se tenait sur ses gardes et ne perdait jamais une occasion de reprendre l’offensive.

Ainsi, le 2 janvier 1861, il rendait compte à Victor Hugo, qui, déjà, avait fixé à trois cent mille francs le prix de son roman, des négociations qu’il avait entamées et des difficultés qu’il rencontrait :


…Je n’espère pas que la somme de trois cent mille francs puisse être trouvée. Les plus hardis de ceux à qui je pensais sont, par suite des événements financiers, hors de combat…

La grande objection, c’est les six volumes, c’est la grosse somme à tirer du public pour un seul ouvrage ; aussi, pour peu que cela vous soit possible, sera-t-il bien utile de donner le livre en trois séries, ayant chacune son titre particulier.


Comme on le voit, au début de 1861, Hetzel n’avait encore rien de définitif à proposer ; les capitaux ne semblaient pas disposés à affluer de son côté ; pourtant il ne veut pas lâcher prise et, sept jours plus tard, le 9 janvier, il insinue amicalement :


Je trouverai l’occasion, quand vous le voudrez, dans une correspondance de l’Indépendance, de bien faire comprendre au public que le livre n’est encore qu’à vous, qu’il est libre tout à fait par conséquent.|85}}

Si vous aviez une formule dans l’esprit pour cette note, donnez-la-moi.


Hetzel devant aller à un congrès en Allemagne où il se trouverait en relations avec les libraires de tous les pays, jugeait l’occasion favorable pour parler éventuellement d’une traduction des Misérables. Il confie à Victor Hugo ce projet, tou-